DESILLUSIONS

Vanity 31_janv15
Vanity Fair n° 31 – janvier 2016

Aïe ! Cela devait bien arriver un jour. La lecture de mon magazine préféré ne m’emmène nulle part. Je reste devant la porte d’embarquement à m’essuyer les pieds maladroitement sur le paillasson d’une hébétude chevrotante et pas anticipée. Alors que désemparé j’effectue le mouvement de balancement avec mes jambes – deux métronomes perdus et solidaires qui battent la mesure de ma déception – me revient un souvenir contrasté.

Au bout du fil une jeune femme avec laquelle je tenais des conversations commerciales : sa voix et ses à-propos m’enchantaient. J’étais sous son charme. Je l’invite un jour à déjeuner en espérant bien sûr que la rencontre clôturera la longue période de fantasmes et de latence induite pour déboucher sur le début d’une belle histoire. Hélas dès l’entrée de son corps dans mon champ de vision l’agréable silhouette téléphonique et la jolie personnalité que j’avais imaginées se désagrègent pour se transformer en une figure ingrate et maladroite. Les propos qu’elle lance autour d’elle me désespérèrent. Mon rêve se brise, je m’en veux d’être à la fois si sectaire et si profondément déçu. Engoncé dans la dictature de mon renfrognement j’essaye malgré tout, pendant le déjeuner, de lui trouver des circonstances atténuantes ; hélas, mille fois hélas, espérances éthérées et épiderme teigneux ne font pas bon ménage ! Je ne la supporte pas. La chose est entendue, ma solitude immense, mais déjà du fond de ma conscience une petite voix ricane. Acteur-moqueur d’un optimisme forcené, face aux désillusions je prendrai toujours le parti-d’en-rire. Déception et satisfaction ne sont que les deux faces d’une même comédie, que m’importe la pente pourvue que je reste en vie.
Je conclus cette 24e chronique et fête l’anniversaire des 2 ans du début de mes voyages en magazine en jetant ma plume en l’air dans l’espoir qu’elle retombe plus inspirée la prochaine fois. J’éclate de rire aussi !

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